Transformation d’un hôtel de maître à Lille en habitat collectif semi-passif


Ce bâtiment à la longue façade rigoureuse et élégante, construit de 1621 à 1626, a traversé les siècles en changeant maintes fois de fonction : mont de piété, école de chimie, école primaire, archives départementales, musée, etc. Dernière affectation prévue : accueillir les services de la DRAC régionale, mais le projet fut avorté en 2009. En attendant, l’hôtel avait bénéficié d’une rénovation partielle (toiture, façades et planchers).

La mairie de Lille reprend alors le bâtiment et le propose à plusieurs bailleurs, afin de créer un logement collectif. C’est ICF habitat Nord-Est qui est retenu et qui détermine en concertation avec la ville de Lille, le cahier des charges : 29 logements de tailles diverses, une rénovation énergétique aux normes de 2005. Point supplémentaire : la proximité immédiate de bâtiments historiques classés impose de conserver l’aspect extérieur du bâtiment.

La performance énergétique visée était de 104 kwh/m²/an. Au final, le chiffre est divisé quasi par deux : 58 kwh/m²/an, grâce à une contrainte technique. La chaudière centrale ne peut dépasser la puissance de 70 kw, sous peine d’aménagements supplémentaires obligatoires, liés à la sécurité. Mais l’espace nécessaire n’est pas disponible. Le bureau G.O-Architectes et son architecte désigné, Olivier Lahote transforment alors cet écueil en un avantage qui orientera l’ensemble du chantier : « La faible puissance de chauffage fut en définitive une bonne chose. Nous nous sommes alors concentrés sur l’enveloppe du bâtiment afin de renforcer la qualité de l’isolation et l’étanchéité à l’air. Et nous y sommes parvenus tout en préservant le cachet initial, notamment les anciennes poutres maîtresses, laissées apparentes. »

En bon état intérieur, l’hôtel ne nécessite pas de remaniement structurel important, et le travail de fond peut prendre place. Vu la hauteur confortable des plafonds, le plancher du rez-de-chaussée est surélevé de 25 cm, ce qui permet à la fois de faire passer les conduits techniques et d’isoler sur une épaisseur de 18 cm à l’aide de laine de roche en vrac. Un panneau en OSB ou Fermacell et un revêtement en vinyle ou en carrelage complètent le travail. Les planchers des niveaux 1 et 2 sont composés de dalles de béton brut. Après réagréage, un vinyle épais acoustique est posé sur la chape en couche de finition.

La toiture du bâtiment possède une forme un peu particulière, dédoublée, en forme de « M », avec au milieu un collecteur d’eau de pluie. La créativité du bureau d’architecture a permis d’exploiter cette particularité au mieux avec un double bonus : « Pour gagner de l’espace habitable au niveau des studios sous les toitures, nous avons supprimé le plancher des combles pour profiter du volume, ce qui a permis de créer une double hauteur sur une partie du logement, et une mini mezzanine pouvant accueillir un lit. Deux grandes fenêtres de toit ont pu être posées et apportent beaucoup de lumière. Au sein des combles, là où le plancher est resté à sa hauteur initiale, nous avons pu faire passer une galerie technique et les conduits de ventilation de la VMC, facilement accessibles par un technicien. »

La couverture du toit est confiée à des ardoises naturelles. La toiture est de type « froide » : le plancher des combles est isolé avec 26 cm de laine de verre, avec pare-vapeur intégré. Une membrane supplémentaire gérant l’étanchéité à l’air.

Les murs extérieurs ont été doublés par l’intérieur avec une cloison métallique supportant 16 cm de laine de verre en panneaux, complété par une membrane d’étanchéité. Astuce : l’ossature étant posée devant l’isolant et non pas dans l’épaisseur de celui-ci, un vide technique de 5 cm permet de faire passer les canalisations. La paroi est finie en plaques de plâtres.

Au niveau des châssis, la créativité technique est aussi de mise, vu une épaisseur totale de la paroi de 90 cm (65 cm de mur et 25 cm de paroi intérieure) et l’obligation de ne pas modifier l’aspect extérieur du bâtiment. En fait, il y a deux châssis en enfilade par ouverture. « Les fenêtres extérieures sont en bois simple vitrage. On a juste créé une ventilation via une défonce au niveau des appuis de fenêtres, sur le cadre dormant inférieur du châssis. Pour les fenêtres intérieures, des précadres métalliques sont fixés sur la brique du mur pour assurer une étanchéité à l’air de la cloison. Le châssis de la fenêtre vient alors se fixer en s’insérant au sein du précadre. »

La ventilation s’effectue via une VMC simple flux, se régulant automatiquement en fonction de l’hygrométrie. Un dispositif plus simple à régler, entretenir et placer dans de l’existant qu’un système double flux. Le chauffage central fonctionne aux pellets, une solution plus écologique que des combustibles fossiles et néanmoins pratique.

Au final, un chantier achevé en 2015, qui aura duré à peine une année et qui permet à cette bâtisse à deux pas de la gare de Lille de poursuivre une nouvelle vie, assurant une cohabitation entre l’architecture ancienne et nouvelle et apportant un grand confort thermique à ses occupants, de par l’alliance entre ses qualités initiales (inertie thermique) et les techniques modernes déployées.


Type de bâtiment : Habitat collectif
Localité : Lille (France)
Surface du bâtiment : 2060 m²
Date de construction initiale : 1626
Date de rénovation : Décembre 2013 à Décembre 2014
Consommation énergétique : 58 Kwh/m²/an

Architecte : G.O-architectes www.goarchitectes.com
Entreprise(s) ayant collaboré au projet
MSE Ingénierie (bureau d’études fluides)
Rabot Dutilleul Construction (entreprise générale)

Isolants utilisés et épaisseur
Toit : Laine de verre (26 cm)
Murs : Laine de verre (16 cm)
Plancher : Laine de roche en vrac (17 cm)

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